8 nov. 2012

GIALLO (Chronique DVD)

OPERA-COMIQUE...



Yellow, en effet la ligne a été franchie...

Projet americain se reclamant hommage au genre franchement oublié depuis des lustres (mais aujourd'hui glorieusement revisité grace aux frenchies énamourés des oeuvres telles que AMER ou BLACKARIA),




ce GIALLO atterrit après moult péripéties sur le bureau du Maestro de l'horreur naturaliste et symphonique, j'ai nommé l'inquietant et survivant (sa vie est un manifeste qui rendrait jaloux Keith Richards...) Dario Argento, prince des ténêbres qui illumina de ses cauchemars oniriques et de ses félures de biens belles pellicules qui aujourd'hui demeurent table de la Loi dans un genre cinématographique souvent malmené.
Giallo donc.



Avoir été est un chemin de croix, certes. Aujourd'hui décrié et mal-aimé par nombre de ses enfants chéris qui attendent la Résurection Ultime, quand exista Suspiria ou Les Frissons de l'Angoisse, dur labeur que d'imaginer égaler le cahier des charges. Le monde vieillit, nos reflexes se rouillent, notre vue baisse et l'envie n'est plus synonyme d'annihilation du quotidien. Dario aussi vieillit.



Ceci etant posé, que vaut ce thriller ?
Revenir au genre et inspirer une nouvelle franchise, un nouveau cycle, non.
Tenter d'exister et tenir tant bien que mal la barque malgré des flots déchainés (post-production calamiteuse et casting aléatoire finalement assez peu inspiré-nous y reviendrons-), oui.

Dario ici est certes à la rue et travaille à l'aveugle (et Dieu sait que Turin pouvait être sa canne salvatrice) dans une tentative maladroite de distiller interet et malaise à travers l'enquête pateuse d'un flic flanqué de la soeur d'une victime présumée d'un notoire psychopathe (attention, incarnation dantesque-nous y reviendrons-), flic au passé traumatisant qui cherchera à travers cette enquête la rédemption salvatrice.
Aimer Adrian Brody ici ne suffit plus. Même si dans cette distribution il tente maladroitement d'incarner au mieux son personnage de solitaire accroc à la clope (cela dit, quel plaisir de revoir des personnages cloper toutes les 3 mn dans un film, cela change de ce politiquement correct des films environnants et en attendant d'autres adaptations cinématographiques des livres de Chandler ou autres James Ellroy, fait finalement office de bouffée d'air frais dans un monde cynique et donc pitoyable-fin de la parenthése-), ses mines renfrognées trop souvent appuyées n'arrivent pas a aider ses autres partenaires (Emmanuelle Seigner en roue libre completement aux fraises et donc hors-sujet, sa prestation etant même souvent genante ainsi que la concubine patentée d'Adrian, Elsa Pataky jouant sa vie dans ce role-je rigole- et osant une mise à nue actoriale comme une fière enfant lors de sa première representation à la fête des écoles devant des parents attérés-mais bon sang on ne renie pas la famille !- mais heureux quand même , Elsa Pataky qui après ces scènes de tortures et d'humiliations-humiliation pour elle-se suicidera artistiquement et retournera vivre aux cotés de son lumineux ex, à savoir le talentueux Michael Youn-je rigole...-).
Mais la cerise sur ce cake somme toute trop sec reste le rôle tout en nuance du psychopate, véritable appel au meurtre tant depuis Toxic Avenger (et cela était voulu à l'époque) on n'avait supporté pareille débilité.
Tout le long du film la désagréable impression d'avoir affaire à un Rambo échappé de la Colline à des Yeux irrite notre (sûr) bon goût et finit de nous achever.
Aucune volonté ici de décripter la bande musicale accompagnant ce film plus proche d'un telefilm de debut de soirée sur TF1 tant elle est sans caractere et soporifique au possible, ce qui reste un comble quand on connait l'importance de la musique dans les (lointaines et anciennes) oeuvres du Maestro...

Vous conseiller de regarder cette "oeuvre" en version française vous fera par la suite adorer les fulgurances de tous les soap-opéra (...!) du monde entier...et ranger "Helène et les garçons" au rang de chef-d'oeuvre...



Alors, quid du moral quand coulent les dernieres gouttes de sang...
Par respect pour l'oeuvre crée, et dans un optimisme béat je ne peux me résoudre a imaginer la totale déchéance artistique de celui qui a traumatisé (et géneré) des générations fanatiques de cinéphiles /cinéphages et attend avec impatience le sursaut digne éspéré, de celui qui inventa une réelle terreur physique, une émotion charnelle troublante via le grand écran, qui déchira à force de lacérations nos dernieres resistances d'humains cartesiens, de mornes bien-pensants et generera de solides défricheurs de l'extreme.

Contrairement à d'autres, je ne peux ici me résoudre de bruler mes Idôles.
Ne l'enterrons pas trop vite, car à l'instar des chats, Argento possêde lui aussi 7 vies...
Ce GIALLO restera donc anecdotique (ce qui est une véritable héresie dans ce vocabulaire) et pour digerer l'amére pillule il nous restera encore les péripéthies aléatoires de la fille (Asia) que l'on sait capable du meilleur (quand elle ne sombre pas trop souvent dans la facilité...) ou des trésors à disposition (vous en faire l'énumération serait injure) qui font nos beaux jours depuis nos antiques vidéos-clubs aux recents supports numériques.
Et comme le signifiait Dario Argento dans l'une de ses récentes interviews (Mad Movies Hors-série no 16) :
"(...) chaque tournage est une aventure differente, on ne peut géneraliser. On ne peut pas dire : «Dario Argento fait comme ça, il filme comme ça.»
Non ! Je change à chaque coup, je suis une surprise pour les gens qui travaillent avec moi...!"

Gageons que la voix du maestro trouvera bientôt un écho favorable, à travers les nuits sombres de la désillusion et du dédain, brisant les cristaux de nos opéras qui depuis trop longtemps ont abrité notre tristesse, notre infinie croyance en de lumineux lendemains.
Qu'enfin, nous passions du cauchemar au rêve...