9 nov. 2012

SATAN JOKERS : Addictions (Chronique CD)



SATAN JOKERS : ADDICTIONS
Glenn Hughes s'en est sorti. Tommy Bolin non.
Et Renaud nous aurait manqué, si...

Renaud Hantson de retour aux affaires et seul capitaine, loin les galéres et garde fier le cap, SATAN JOKERS est prêt à l'abordage.
2009 fut comblé (2 albums, "SJ" et "Fetish X"), 2012 sera l'apogée avec ce "Addictions", manifeste heavy-metal (mais pas que), album parfait et exutoire precieux, co-ecrit avec le sympathique psychiatre addictologue Laurent Karila, inspiré (mais nous y reviendrons), et les talentueux Aurel (à nouveau aux affaires après 2 titres sur "Fetish X, groovy sur les peaux et impitoyable dans sa frappe), Pascal Mulot (base et basse) et Michaël Zurita (guitare), tous impressionants de feeling et de concision.
SATAN JOKERS donc.

Opaque fumée, "More" encore tatoué au plus prêt de l'âme, addicted to chaos, difficile de ne pas entrevoir la lumière malgré tout...

Cette voix unique, cette vérité bancale qui assêne que les meilleurs toujours partent les premiers (mais alors, qu'est-ce que je fous encore là, moi...?), ces grandeurs et décadences quotidiennes, quand l'aube efface à peine le vomi de la veille, quand tout est tordu, de la cuillière aux espoirs vaporeux, quand les addictions deviennent des additions, nos meilleures ennemies, cette salope qui sait se draper de soie, jarretelles mortelles mais qui fait toujours payer comptant, pas forcement content.

Ne pas finir tout de suite dans une boite en bois quand l'histoire débute avec une petite boite en fer, la prophécie SATAN JOKERS s'exprime : il s'agira de Heavy-Metal, il s'agira d'une épopée.
1983 accouche des Fils de Métal et 10 000 exemplaires attesteront de la bonne santé des enfants. Une vague deferle sur laquelle surferont nombre de formations inspirées, volontaires, affamées et terreaux bénis pour toute une adolescence frappée des armoiries aux couleurs de la kro et des gitanes maïs, un autre Renaud trainant dans les blêmes HLM egayera aussi les pisseux trottoirs sur lesquels les plus aventureux "kittaient" leurs 103 peugeot.

SATAN JOKERS. Ils étaient laids, vulgaires, braillards et imbeciles, mais ça tu sais, ça fait un "style" ! Le second degré echappera à bon nombre. Tant pis. Motley Crue (Dr Feelgood / Dr Vice déjà...?) de la banlieue. Toute une époque.
Zégut sur RTL soutiendra l'effort mordicus mais la presse toujours autant téméraire fera sourde oreille. "Trop Fou Pour Toi" ajouté de sa version anglaise effrayera par trop de styles mal digérés (le MC5 n'est pas soluble dans la soupe FM) et se crashera brutalement. SATAN JOKERS III , mini-album de 6 titres sonnera le glas d'une ère, offrant comme porte de sortie à son batteur/chanteur le gazon vert des comedies musicales telles Starmania ou Notre-Dame de Paris.

Cigale ou fourmi, il est temps de grandir, une carrière solo déroule son tapis rouge ("Ça Ne Suffit Pas Toujours" diffusé quasi en boucle sur Radio Val d'Oise en 1992 sera le lit de mes nuits d'insomnie et le cri final m'emeut encore et toujours ), et il y aura d'autres biens beaux succès.
Mais peut-on definitivement se cacher, et occulter la vérité. Sa vérité ?



Les années passent, lourdes comme du platre, efficaces comme un coma. Le temps ne fait rien à l'affaire, il faudra bien se regarder un jour dans le miroir.
Addictions. Soleil. Mais ténêbres aussi. L'un ne va pas sans l'autre.
Sexe, drogues et Rock n' Roll (notez les majuscules, choisies), Sainte Trinité pour esprits faibles, (et ceux-lá sont morts), miroir aux alouettes fendu, les survivants étaient les moins aptes, sans doute les plus futés.

Renaud est toujours debout, ce boxeur dans un ring de chiméres, quand on est trop grand pour la Vie, forcement alors cela deborde.

Addictions. Cocaïne, abricots défendus, seins obus, méphédrone, pharmacies complaisantes et sirop du gamin, hépatites, désillusions et je caresse la joue de Dieu, tout y passe, mais tout lasse, et tout casse.
Une rencontre improbable via facebook et la petite fée se reveille enfin (le monde est si "stone"...), bienveillante.
Laurent Karila sera le serrurier, et les textes qu'il offre pour l'élaboration du nouvel album de SJ fracassent portes et fenêtres. Offrent juste l'Horizon.
Laurent Karila n'est pas Eugène Landy, Renaud Hantson restera debout.
Et cet album en est la plus belle preuve.

Concept-album et therapie d'envergure, de la seringue au don de soi, du renoncement à l'acceptation, tout est posé avec sincerité, voix eblouissante et mots léstés d'emotions justes, musicalité aérée et haute tenue du propos, convergence parfaite de neurones soeurs s'etant enfin trouvées.

Heavy et bombastique, tubes monstrueux à la pelle, goûtez ce"Appetit pour l'auto-destruction", jouissif missile qui va droit au but, speederie qui fleure bon nos 16 ans ou "Detox", caviar auditif avec son refrain majestueux, ces souveraines vocalises tutoyant les anges. Mêmes delicieuses sensations avec la puissante balade "Lune De Miel", absolu chef d'oeuvre qui ne peut vous laisser insensible, car à ce moment précis, nous savons qu'il chante pour nous, et nous seuls, coeurs talqués brisés, nous savons...
"Substance Recompense", belle piece FM, à la basse sautillante et au solo lumineux brille de mille feux, comme le sourire de la bien-aimée lovée au creux de notre epaule.
C'est le tres melancolique "Une Semaine en Enfer" aux guitares convoquant tous les Bon Jovi ou Def Lepp de la terre qui frappe l'oeuvre du sceau royal d'un artiste majeur, ecorché vif mais vif argent, scintillant comme l'etoile du berger, qui fait aujourd'hui de son existence chaotique un point de repére.
Mieux, un point de ralliement.

Renaud Hantson offre avec ce "Addictions" la plus belle oeuvre musicale française toute categorie confondue depuis fort longtemps.
Car ami, crois moi, ce Heavy Metal est d'utilité publique. Et il sauvera des vies.
Reellement-

Renaud, Laurent, juste une chose encore : Merci-